Par Julien Courtois, maître de chapelle

Cette période de confinement inédite empêche la pratique musicale collective comme nous avons l’habitude de la vivre. Pour autant, plusieurs orchestres ou chorales ont su faire preuve d’inventivité pour continuer à jouer et chanter…

Un art vivant

La musique est par définition un art vivant. Même si la technologie a permis l’enregistrement et la diffusion d’une musique « en boîte », l’expérience musicale ne prend toute sa plénitude que lorsqu’elle est vécue physiquement. De plus, et bien qu’il soit possible de pratiquer son instrument seul (il en va de même pour un chanteur), la musique demeure avant tout une discipline collective. Elle se vit ensemble : un groupe d’instrumentistes ou de chanteurs qui développent une polyphonie, font entrer les sons en harmonie, c’est là l’essence même de la musique ! Elle entre en résonnance avec un lieu, avec un public. C’est ainsi que la musique pénètre plus profondément au cœur de chacun, ceux qui la jouent comme ceux qui l’écoutent, et qu’elle suscite des émotions intenses, parfois spirituelles. La musique est capable de nous transporter, de nous transcender, de nous élever.

La musique et le confinement

Le confinement entre donc en total contradiction avec la définition que nous venons de donner d’une musique vivante et collective. Nous voici, depuis plusieurs semaines, privés de tout contact avec les autres pour des raisons sanitaires évidentes. Les musiciens ont pu ressentir durement cette absence de contact, cette impossibilité de partager leur art. Plusieurs ont ainsi redoublé d’ingéniosité pour contourner cette impossibilité et, à l’aide des moyens technologiques actuels ont organisé des concerts virtuels, chacun enregistrement chez soi sa partie. Grâce à un travail de montage fastidieux, nous avons ainsi pu voir fleurir sur internet un grand nombre de vidéos qui ont su recréer ce lien que le confinement avait brisé. C’est ainsi que, dans notre diocèse du Puy, quelques maîtrisiens de la cathédrale du Puy ont participé à ce chœur virtuel de 250 petits chanteurs français chantant l’Alléluia du Messie de Haëndel, vidéo qui a dépassé les 184 000 vues ! De même, les jeunes du groupe Alive ont réalisé une performance de ce genre sur le chant « Abba, père ».

Créer du lien

Les italiens ont été les premiers à se retrouver le soir à leurs balcons pour partager un moment musical avec leurs voisins. D’autres initiatives de ce genre ont été reprises un peu partout dans le monde. En France, nous avons notamment la proposition « Eurobalcon » à l’initiative des deux Conservatoire Supérieurs de Paris et Lyon et du Centre de Musique Baroque de Versailles : tous les musiciens qui le souhaitent sont invités à jouer le fameux Prélude du Te Deum de Charpentier (utilisé comme indicatif de l’Eurovision) chaque vendredi à 19h. C’est ainsi que la musique remplit aussi un de ces rôles important : celui de créer du lien… jusqu’à ce qu’il soit possible de se retrouver enfin pour jouer ensemble à nouveau.