Déclaration de Mgr Brincard sur le projet de loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe.

Le projet de loi proposant d’ouvrir le mariage civil et la filiation aux personnes de même sexe soulève de graves enjeux dont tout citoyen doit prendre conscience. En effet, le mariage est une des sources du lien social en tant qu’il est l’articulation de la conjugalité et de la parenté. Cette articulation ne relève pas de la seule sphère privée mais intéresse la société tout entière et donc l’Etat qui est le garant de la paix civile. Or la paix véritable ne peut être fondée que sur la justice. La question principale à poser face à ce projet est ainsi la suivante : l’ouverture du mariage et de la filiation aux personnes de même sexe est-elle juste ?

Ce projet de loi fait sienne la revendication exprimée par une partie des personnes homosexuelles demandant une égalité de traitement. Les expressions « égalité de tous devant le mariage » ou « mariage pour tous » laissent entendre que selon le code civil en vigueur une catégorie de citoyens n’ayant pas le droit de se marier subit une discrimination injuste. Notons qu’à l’heure actuelle l’orientation sexuelle n’intervient en rien dans la constitution du mariage. Ce qui est pertinent au regard du mariage n’est pas l’orientation sexuelle des partenaires mais leur sexe, homme ou femme. En effet, le maire vérifie certaines conditions requises pour se marier : le consentement et le nombre des futurs époux, leur sexe ainsi que leur absence de lien de parenté. La différence des sexes est ainsi une condition au même titre que la monogamie et que la non-consanguinité. Pour quelle raison ces conditions sont-elles exigées pour avoir accès au mariage ? Parce que le mariage n’est pas la simple reconnaissance d’un sentiment amoureux mais le cadre juridique dans lequel la vie commune des époux est susceptible d’être source de nouveaux êtres humains. Ce qui se joue dans le mariage civil est donc la dimension sociale de la conjugalité en raison de la possibilité d’engendrer des enfants.

L’apparition de technologies médicales d’aide à la procréation a fait naître dans l’opinion publique la croyance que la sexualité des époux n’était plus la source de la filiation. De même, la pratique déjà très ancienne de l’adoption semble valider l’idée que la volonté est le fondement premier de la filiation. Dans la continuité de ces deux pratiques, techniques et juridique, certains réclament que désormais deux personnes de même sexe partageant un projet parental puissent devenir parents, c’est-à-dire soient reconnus par l’Etat comme dépositaires de la plénitude des droits et des devoirs liés à l’exercice de la filiation. Or à cette revendication, nous opposons le droit de l’enfant à être reçu et élevé par son père et sa mère. Se savoir issu du désir de son père pour sa mère et réciproquement est le roc sur lequel un enfant peut déployer ses capacités dans les meilleures conditions. Le fait qu’il existe de nombreuses situations dans lesquelles des enfants ne bénéficient pas de cette continuité et de cette unité ne peut en aucun cas légitimer la création d’une catégorie a priori d’enfants délibérément privés de ces biens et de ces droits essentiels. L’ouverture du mariage aux personnes de même sexe dénaturerait cette institution en supprimant les notions de mari et de femme, de père et de mère au bénéfice de mots neutres signifiant une indifférenciation des fonctions et des identités. Un enfant a besoin de ce jeu de différences complémentaires grâce auxquelles il peut progressivement développer son identité personnelle. Si le législateur décide que demain certains enfants auront deux pères mais pas de mère ou deux mères mais pas de père, il instaurerait un mensonge d’Etat.

Un Etat qui renie les droits les plus fondamentaux des êtres humains les plus vulnérables viole la conscience des citoyens. Seule la recherche de la justice peut assurer le bien commun et nourrir l’espérance d’un réel progrès humain.

+ Henri Brincard Evêque du Puy-en-Velay