Homélie prononcée par Mgr Henri Brincard, évêque du Puy-en-Velay, en la cathédrale, le mardi 3 avril 2012, à l’occasion de la Messe Chrismale.

Chers frères prêtres,

Chaque année, au cours de la Grande Semaine, nous vivons un temps fraternel suivi d’un moment exceptionnel pour votre vie sacerdotale et pour votre évêque. Ce moment est celui du renouvellement de vos engagements sacerdotaux au cours de la messe chrismale, célébrée dans notre cathédrale. Je suis certain que vous éprouvez une émotion intérieure ravivée par de nombreux souvenirs. C’est aussi pour vous, je le souhaite de tout cœur, un temps d’espérance.

Nous vivons une année à la fois passionnante et difficile. Passionnante d’abord. Diakonia, la célébration du 5Oème anniversaire du Concile Vatican II, le synode annoncé de l’Eglise universelle, synode réuni sur le thème de la Nouvelle Evangélisation, enfin, le commencement à l’automne de l’Année de la Foi sont autant d’événements marquants, autant de chemins de renouveau pour nos communautés chrétiennes. Comment ne pas nous réjouir aussi de la générosité de tant de fidèles laïcs, de l’ardeur aussi de ceux et de celles qui, consacrés ou fidèles de nos paroisses, s’engagent de diverses manières au service du Peuple de Dieu.

Pour ma part, chers frères dans le sacerdoce, je m’émerveille de votre charité pastorale que rien ne rebute, que rien n’effraie, que rien ne décourage. Heureux évêque d’avoir un tel presbyterium ! Après mes nombreuses années d’épiscopat au milieu de vous, je tiens à redire mon vif désir d’être de plus en plus pour chaque confrère le père, le frère et l’ami dont il a besoin pour remplir avec sérénité sa grande et indispensable mission. Vous comprenez dès lors pourquoi, avec une insistance particulière, je me recommande à votre prière.

L’année que nous vivons n’est pas de tout repos pour notre ministère. Je ne veux pas m’y attarder sinon pour dire ceci. Certes, le bonheur d’avoir été appelé à être prêtre du Seigneur trouve de multiples raisons de croître, mais nous devons aussi regarder en face l’ampleur des défis à relever, avec la grâce de Dieu. Dans le contexte d’un monde qui, chez nous, après des siècles de chrétienté se sécularise rapidement, les défis pastoraux sont nombreux. Ils concernent ce que le bienheureux Jean-Paul II a appelé la « Nouvelle Evangélisation ».

Les évêques de France en ont parlé à leur dernière assemblée à Lourdes. Lors du prochain synode autour du successeur de Pierre, la Nouvelle Evangélisation sera aussi le thème d’une réflexion enrichie par de nombreux échanges entre évêques venus du monde entier. Alors la question est celle-ci : « Que signifie, pour nous prêtres et évêques, la Nouvelle Evangélisation dont nous sommes à la fois les heureux bénéficiaires et les serviteurs infatigables ? »

Pour nous, comme pour tout chrétien, la Nouvelle Evangélisation est d’abord un appel fort à la conversion permanente. En effet, pour être vraiment l’apôtre du Ressuscité, il nous faut être auparavant son disciple, disciple de Celui qui nous invite à « le suivre partout où Il est allé ». Autrement dit, être disciple du Christ, signifie que notre appel à la sainteté est indissolublement lié à l’exercice même de notre ministère sacerdotal.

Parce qu’il participe de manière spécifique au mystère du grand Prêtre unique et éternel, la charité du prêtre se relie d’abord à celle de Jésus Christ, le Bon pasteur. Écoutons le bienheureux Jean-Paul II nous dire : « La charité pastorale est la vertu par laquelle nous imitons le Christ dans son don de soi et dans son service. Ce n’est pas seulement ce que nous faisons mais c’est le don de nous-mêmes qui manifeste le don du Christ pour son troupeau. La charité pastorale détermine notre mode de pensée et d’agir, notre mode de relation avec les gens. Cela devient particulièrement exigeant pour nous ».

Permettez-moi de rappeler à ce propos que la charité pastorale a comme destinataire l’Eglise et, selon les mots mêmes du dernier concile, cette charité « exige des prêtres, s’ils ne veulent pas courir pour rien, un travail vécu en communion permanente avec les évêques et leurs autres frères dans le sacerdoce  ». Le concile Vatican II a également insisté sur la fait que la charité pastorale « découle surtout du sacrifice eucharistique ; celui-ci est donc le centre et la racine de toute la vie du prêtre dont l’esprit sacerdotal s’efforce d’intérioriser tout ce qui se fait sur l’autel du sacrifice  »

Chaque jour, à la messe, nous rendons présente l’offrande de la croix, ce soleil autour duquel tournent l’Eglise et le monde. Le cardinal Charles Journet, ami et conseiller très écouté de Paul VI, l’a écrit en des termes qui expriment avec profondeur notre expérience de prêtre : « Le mystère de l’eucharistie est le mystère où bat le cœur de l’Eglise, où Dieu touche notre terre, de la manière la plus immédiate, pleine de la brûlure de son amour. Chaque messe est, à travers la croix du Christ, une grande bénédiction, une explosion silencieuse de l’Amour, une grande descente de Dieu dans le monde pour empêcher qu’il périsse et que le mal en lui l’emporte en lui sur le bien. Et, en retour, chaque messe provoque, dans une partie cachée du monde, une réponse d’amour, qui, à travers la croix du Christ, monte jusqu’à Dieu ».

Nous nous réjouissons d’avoir des séminaristes. Ils sont un signe d’espérance pour notre diocèse. Aujourd’hui, j’ai le grand bonheur de vous annoncer que j’appelle Pierre de Veyrac à être prêtre. Il sera ordonné dans notre cathédrale, le 1 juillet prochain. Avec vous et tout le peuple de Dieu, je rends grâce pour les familles au sein desquelles naisse une vocation sacerdotale. Coopérons avec le Maître de la moisson par la prière et pour nous, prêtres, d’une manière spéciale par notre charité pastorale. Celle-ci est sûrement une voie privilégiée par laquelle Jésus appelle jeunes et moins jeunes au sacerdoce.

Je ne veux pas conclure sans vous dire que j’unis ma prière à la vôtre pour les confrères fatigués ou éprouvés de diverses manières. Que la Vierge Marie, Notre-Dame du Puy, leur apporte réconfort et espérance !

En ce jour, où nous renouvelons nos promesses sacerdotales, demandons à la Mère de l’Eglise que notre « Fiat » devienne « Magnificat » !

+ Henri Brincard 
Evêque du Puy-en-Velay

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