24 mai 2020
Aimer le Père à la suite de Jésus (Jean 17, 1b-11a)
Homélie de la messe radiodiffusée sur R.C.F. Haute-Loire
Avant que Jésus ne parte pour le jardin des Oliviers où il va être arrêté et entrer dans sa passion, l’évangéliste Jean nous permet de connaitre – d’entendre – la dernière grande prière que le Christ adresse à son Père. Il sait que l’heure est venue pour lui d’aller jusqu’au terme de sa mission, il sait ce qui l’attend, il sait qu’il va retourner vers le Père, il sait que ses disciples vont se disperser et qu’il faudra qu’ils reçoivent le don de l’Esprit Saint pour comprendre sa mort et sa résurrection. Il renouvelle sa confiance en son Père et révèle à ses disciples combien l’amour qui l’unit au Père est fort, car c’est cet amour qui l’a conduit tout au long de sa vie terrestre. Plus encore, c’est cet amour qu’ils se portent l’un à l’autre qui est au cœur même de la Bonne Nouvelle qu’il est venu offrir à tous.
Ainsi, si nous cherchons un fil conducteur quand nous lisons l’Evangile et les raisons qui motivent Jésus dans tout ce qu’il fait, nous trouvons, en bien des pages, l’amour qu’il porte à Dieu qu’il nomme Père. Lui-même, se désigne comme le Fils de ce Père qu’il cherche à faire connaître aux hommes, et en particulier à ses disciples. Rappelons-nous, dès son plus jeune âge, Jésus, que ses parents cherchent désespérément à Jérusalem, leur explique : « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » (Lc 2, 49). Rappelons-nous encore, lors du baptême de Jésus au Jourdain par Jean-Baptiste, cette voix qui descend du ciel et qui affirme : « Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. » (Lc 3,22) C’est la voix du Père qui le désigne comme son Fils bien-aimé, celui qui vient réaliser la mission qu’il lui a confiée. Ainsi Jésus prie le Père : « Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie […] Moi, je t’ai glorifié sur la terre en accomplissant l’œuvre que tu m’avais donnée à faire. » (Jn 17, 1- 4).
Voyant souvent Jésus se retirer à l’écart, ses disciples lui demandent de leur apprendre à prier, et Jésus leur partage sa propre expérience. Il leur offre ses propres mots que, depuis 2000 ans, les chrétiens récitent en appelant, à leur tour, Dieu « Père » … Notre Père qui es au cieux… la seule et unique prière que Jésus laisse à ses amis, c’est celle qui s’adresse à Dieu comme à son Père et à notre Père. Si la prière, c’est parler à Dieu, alors nous nous adressons à Lui comme un Père qui nous aime. « Mais toi, quand tu pries, retire-toi dans ta pièce la plus retirée, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra. » (Mt 6,6) Il s’agit bien d’un Père qui est proche et qui nous retrouve même dans le plus intime de nous-mêmes, dans notre vie quotidienne.
Tout au long de l’Evangile, ce qui tient à cœur à Jésus et ce qui anime ses actions et ses paroles, c’est révéler combien Dieu nous aime comme un Père plein de miséricorde, d’amour et de pardon. Ainsi, Jésus n’hésitera pas, une dernière fois, sur la croix, à s’adresser à son Père : « Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23, 24). Enfin, la fête de l’Ascension, c’est le retour définitif vers le Père « Et moi, je viens vers toi. » (Jn 17, 11a)
Finalement la vie du Christ est entièrement tournée vers le Père. Et c’est cet amour du Père qu’il a fait découvrir à ses disciples : « Ils ont reconnu que tout ce que tu m’as donné vient de toi, car je leur ai donné les paroles que tu m’avais données : ils les ont reçues, ils ont vraiment reconnu que je suis sorti de toi, et ils ont cru que tu m’as envoyé. » (Jn 17, 7-8) A quoi reconnait-on les disciples du Christ ? A cet amour qu’ils portent, à la suite de Jésus, à Dieu le Père. Et Jésus prie pour eux : « Je prie pour ceux que tu m’as donné car ils sont à toi. » (Jn 17, 9) Suivre le Christ, c’est donc sans cesse nous tourner vers le Père. Souvent, nous pensons que la notion de Trinité est quelque chose de compliqué, mais si nous partons du Christ, il nous conduit au Père, et ce chemin vers le Père, c’est l’Esprit Saint qui le trace pour nous, discrètement dans nos cœurs. C’est cela qui est au cœur de la prière chrétienne : avec Jésus prier le Père à l’écoute de l’Esprit Saint.
C’est peut-être aussi ce que nous rappelle ce dimanche très particulier entre l’Ascension et la Pentecôte. L’Ascension, c’est le Fils qui monte, dans la gloire, à la droite du Père ; et la Pentecôte, c’est l’Esprit promis par le Christ qui descend sur les apôtres pour qu’ils annoncent l’amour du Père. C’est, en quelque sorte, un dimanche très « trinitaire » qui nous invite en cette dernière semaine du temps pascal à nous centrer sur le cœur de notre foi, c’est-à-dire attendre dans la prière – comme les apôtres – la réalisation de la promesse du don de l’Esprit, qui nous permettra d’annoncer : « Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous aviez crucifié. » (Ac 2,36)
Dimanche prochain, nous pourrons nous retrouver dans nos églises et célébrer la Pentecôte ; alors demandons au Christ de raviver en nous l’attente de l’Esprit Saint qui éclaire notre foi et nous montre le chemin vers Dieu, Père de tendresse.
Amen.
+ Luc Crepy,
évêque du Puy-en-Velay