Noël 2016

Homélie de Noël 2016, prononcée par Mgr Luc Crepy, évêque du Puy, à la Cathédrale du Puy.

L’évangile de la messe de la nuit de Noël nous invitait à contempler avec les bergers, l’enfant Jésus à la crèche, dans la nuit, avec Marie et Joseph. Seuls le chant des anges et la joie des bergers s’élevaient dans le silence de cette douce et sainte nuit. Discrétion, pauvreté, humilité, obscurité, rien ne laissait présager que le Sauveur, le Messie, venait de naître. Tout autre est l’évangile de ce jour de Noël. La lumière est là, il fait jour et le soleil apparaît dans son éclat. Avec le quatrième évangéliste, nous sommes appelés à reconnaître en ce petit enfant la Lumière qui traverse les ténèbres de notre humanité, la vraie Lumière qu’est le Christ. « Le Verbe était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. » (Jn 1,9). Le nouveau-né de la crèche est maintenant désigné comme la lumière du monde, Celui qui offre à chacun la possibilité de voir un peu plus clair dans sa vie et de diriger ses pas dans la clarté.

Ainsi, le prologue – le début – de l’évangile de Jean nous fait entrer, avec notre intelligence et notre foi, dans le sens le plus profond de la fête de Noël. Nous allons bien au-delà des sapins, des crèches aux mille personnages et des guirlandes de lumière : nous sommes conduits au cœur du mystère de l’Incarnation : Dieu naît au sein de notre humanité, Dieu se fait homme, Dieu vient prendre, au quotidien, la route des hommes. Voilà la grande nouvelle, voilà la grande joie, voilà pourquoi nous pouvons nous dire, les uns aux autres, « Joyeux Noël ». Rappelons-nous ce que les anges disaient aux bergers : « je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple. » (Lc 2,10) Oui, aujourd’hui, nous fêtons un grand mystère, source de joie pour tout baptisé : l’Incarnation, ce grand mouvement où, comme disait Saint Irénée : « Le Verbe de Dieu installa son habitation parmi les hommes et se fit Fils de l’homme, pour habituer l’homme à percevoir Dieu et pour habituer Dieu à installer sa demeure dans l’homme, selon la volonté du Père. » (C.H. III 20, 2-3)

Habituer l’homme à percevoir Dieu et habituer Dieu à installer sa demeure dans l’homme… une autre manière de dire que « le Verbe s’est fait chair et qu’il a habité parmi nous. » (Jn 1,14) Oui, notre Dieu n’est pas un Dieu lointain et obscur. Notre Dieu, en ce jour de Noël, vient à notre rencontre pour nous dire qui Il est. Et seul, le Christ, dans toute l’histoire humaine, peut nous révéler qui est Dieu, comme l’exprime clairement la lettre aux Hébreux : « A bien des reprises et de bien des manières, Dieu, dans le passé, a parlé à nos pères par les prophètes ; mais à la fin, en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes choses et par qui il a créé les mondes. » (He, 1, 1-2) Ainsi saint Jean souligne que « Dieu, personne ne l’a jamais vu » (Jn 1,18) sinon le Fils qui nous l’a fait connaître. Avec Noël, les cieux s’entrouvrent et laissent apparaître le visage de Dieu ; avec Noël tout homme qui cherche Dieu peut se mettre en marche et trouver une lumière pour éclairer son chemin ; avec Noël, il est possible de dire quel est le nom de Dieu : Emmanuel, Dieu avec nous… ou encore Jésus, le Seigneur sauve.

Si le Christ éclaire tout homme, cette lumière fait apparaître la vocation profonde de l’être humain créé à l’image et à la ressemblance de Dieu : celui qui se laisse illuminer par le Christ, qui accueille dans sa vie – sa vie la plus ordinaire – la lumière que Jésus lui offre, devient alors enfant de Dieu. L’Incarnation, c’est le commencement de ce grand projet de Dieu de faire de nous ses propres enfants, et le Christ, de la crèche à la croix, manifeste jusqu’au bout combien l’amour de Dieu pour nous est grand. Oui, Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu, pour que notre humanité soit divinisée : « A tous ceux qui ont reçu [la Lumière], il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom. » (Jn 1, 12) Noël nous rappelle notre dignité de baptisés : par l’humanité du Fils de Dieu – né de la Vierge Marie, mort et ressuscité – il nous est donné de vivre avec Lui, pour Lui et en Lui. La vie chrétienne est un chemin d’union à Dieu rendu possible par l’Incarnation de Jésus. « Tous, nous avons eu part à sa plénitude, nous avons reçu grâce après grâce. » (Jn 1, 16) Voilà le deuxième grand motif de notre joie aujourd’hui : si Dieu naît dans notre monde, il veut naître aussi aujourd’hui dans nos cœurs et nous faire partager sa vie.

Pour terminer, écoutons de nouveau la prière d’ouverture de notre célébration. Elle nous dit en quelques mots ce qu’est le mystère et la joie de Noël : « Père, toi qui as merveilleusement créé l’homme et plus merveilleusement encore rétabli sa dignité, fais-nous participer à la divinité de ton Fils, puisqu’il a voulu prendre notre humanité. »