La crise sanitaire : un kairos pour la conversion écologique

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La crise sanitaire a été rapprochée souvent de la crise écologique, notamment par ses causes et ses conséquences. Le signe le plus visible est sans doute la baisse spectaculaire des émissions de CO2, notamment dans les grandes villes, grâce à la non utilisation des voitures et des avions. Peut-on alors considérer la crise sanitaire comme une opportunité pour accélérer la nécessaire transition écologique ? Tout dépend de la manière dont on vivra « le jour d’après » : un retour au jour d’avant ou l’émergence d’un jour radicalement nouveau ?

Ce défi résonne fortement avec l’appel de l’encyclique Laudato Si’ à une conversion écologique pensée comme un véritable « changement de paradigme » capable de transformer de manière radicale autant nos styles de vie que l’organisation de la vie en commun. La crise sanitaire pourrait ainsi être le « kairos », le moment opportun, pour générer ce basculement et permettre aux transformations amorcées de faire un grand pas en avant.

Or les transformations à faire autant au niveau individuel que collectif ne sont pas évidentes. Les intérêts et les besoins générés par la crise sanitaire sont très différents à cause notamment de grandes inégalités économiques qu’elle a provoquées. Un temps individuel et commun de réflexion et de discernement semble essentiel avant de repartir dans l’action et afin d’identifier les bonnes solutions.

Beaucoup de voix s’élèvent actuellement pour proposer cette réflexion préalable et nécessaire. En tant que Chrétiens, marqués par le souci permanent de discerner « les signes des temps » et fortement interpellés par le cri de Laudato Si’, nous pourrions participer et contribuer à cette réflexion individuelle et collective qui permettrait peutêtre d’engendrer un « après » nouveau.

La crise sanitaire nous a fait vivre trois expériences radicalement nouvelles par rapport à nos modes de vie habituels :

  • une décélération abrupte qui a interrompu certaines formes de relation et rendu possible de nouvelles relations
  • une incertitude généralisée concernant l’avenir qui a provoqué de l’angoisse mais qui a également libéré l’imaginaire et la créativité
  • une interdépendance extra-ordinaire qui fait de chaque personne, proche et lointaine, une menace et à la fois un allié pour combattre le virus.

Ces trois expériences font écho, d’une manière surprenante, à la conversion écologique proposée par Laudato Si’ : la décélération (arrêter la « rapidation »), la créativité (redéfinir « le progrès ») et l’interdépendance (« tout est lié) constituent des éléments majeurs de son appel.

La notion d’ « écologie intégrale » invitant à penser ensemble et de manière articulée le rapport à soi, le rapport à autrui, le rapport à la nature et le rapport à Dieu, nous donne peut-être une clé pour relire ce que la crise nous a fait vivre afin de mieux identifier ce à quoi nous tenons, ce qui est vraiment essentiel pour nous, et que nous voudrions surtout garder et déployer « le jour d’après » :

  • le rapport à soi : car le confinement a été souvent l’occasion de plus d’intériorité, de temps pour soi, d’intimité, de méditation, mais également de plus de tension et parfois de violence notamment pour les familles nombreuses confinées dans les petits espaces.
  • Le rapport à autrui : car le confinement a été l’occasion de relations nouvelles avec les plus proches et de reprendre contact avec des relations lointaines, d’inventer de solidarités nouvelles avec les plus fragiles, d’être reliés par la reconnaissance commune à l’égard des soignants, et en même temps, pour certains, la poussée vers un repli sur soi et pour d’autres, l’expérience d’une solitude insupportable.
  • Le rapport à la nature : car le confinement a été l’occasion de redécouvrir la présence, les sons, les couleurs et les odeurs d’une nature souvent oubliée et toujours instrumentalisée, mais avec des conséquences souvent drastiques pour les plus pauvres.
  • Le rapport à Dieu : car le confinement a été l’occasion d’expérimenter de nouvelles formes de célébration, de prière, de partage de la Parole, et donc de communion dans les communautés chrétiennes, avec pour certains une souffrance majeure due à l’absence du culte partagé.

La crise sanitaire peut donc être une opportunité pour revisiter ensemble la notion d’ « écologie intégrale » à la lumière de l’expérience nouvelle qu’elle nous fait vivre, et nous préparer à faire que « le jour d’après » soit un saut qualitatif dans la construction de la « maison commune ».

Elena Lasida,
chargée de mission Écologie et Société à la CEF

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