Méditation spirituelle sur Exode 23, 11-21 et Levitique 23, 22 par Henri Salet, diacre et vétérinaire.
Le travail de la terre et l’élevage permettent de nourrir la population. Par rapport à de nombreux métiers, dont le bénéfice pour le monde n’apparaît pas évident au premier abord, l’agriculteur peut trouver dans son travail une belle motivation : être au service de l’homme et de la création. Les prescriptions que nous lisons dans ce passage du livre de l’Exode sont destinées aux agriculteurs/éleveurs: une part majoritaire dans le peuple hébreu du temps de Moïse. Dieu leur demande deux choses :
- être attentif au Seigneur en lui rendant un culte, ne jamais oublier que tout vient de Lui, les biens de la terre lui reviennent, si la terre produit des fruits, c’est grâce à Lui ;
- et ne jamais oublier les pauvres, ceux qui n’ont rien, les plus faibles et les miséreux.
Ces deux prescriptions sont en fait le commandement de Jésus : « aimer Dieu et son prochain comme soi-même. »
Dans la constitution Gaudium et spes, nous pouvons lire au n° 69 : « Dieu a destiné la terre et tout ce qu’elle contient à l’usage de tous les hommes et de tous les peuples, en sorte que les biens de la création doivent équitablement affluer dans les mains de tous, selon la règle de la justice, inséparable de la charité. » Le Catéchisme de l’Eglise Catholique, au sujet de la propriété privée et de la destination universelle des biens ajoute : « L’Homme ne doit jamais tenir les choses qu’il possède légitimement comme n’appartenant qu’à lui, mais les regarder aussi comme communes : en ce sens, qu’elles puissent profiter non seulement à lui, mais aux autres. La propriété d’un bien fait de son détenteur un administrateur de la Providence pour le faire fructifier et en communiquer les bienfaits à autrui, et d’abord à ses proches. »
Les agriculteurs sont conscients de leur rôle : nourrir la population. Et pourtant, dans notre monde actuel, les consommateurs attendent des denrées alimentaires en quantité suffisante, de qualité parfaite et à des prix toujours plus bas. Peu d’entre eux comprennent les aléas de la production agricole. Les agriculteurs sont de plus en plus perçus comme des pollueurs qui vivent de subventions européennes… pourtant ils savent leur responsabilité et peuvent être fiers de leur travail : par leur sérieux, leurs compétences, leur travail, ils ont fait oublier aux habitants de notre pays que les famines ont fait partie des plus grands fléaux de l’histoire de l’humanité.
Jusque dans les années mille neuf cent soixante-dix, lorsqu’un agriculteur devait faner ou moissonner dans l’urgence un dimanche, pour bénéficier de bonnes conditions météo et sauver sa récolte, il demandait la permission à son curé… Le dimanche était encore le jour du Seigneur, et le repos que l’Eglise nous demande (dont le fondement se trouve dans ce texte de l’Exode) était respecté. De nos jours, cette permission n’est sans doute plus souvent demandée… Je pense que les curés devaient l’accorder, ils étaient bien conscients de l’importance d’une bonne récolte : cet accord est un acte de charité. D’ailleurs Jésus ne condamne pas celui qui va sauver son bœuf le jour du sabbat. D’autres actes, les célébrations des rogations, sont des marques de respect et d’action de grâce rendues à Dieu par les bienfaits qu’il nous donne. Ces célébrations nous permettent de ne pas oublier qu’il est à la source de tous biens. Les bénédictions des fermes, des animaux, des récoltes, sont autant de célébrations qui rappellent au monde et aux éleveurs en premier lieu, qu’ils sont aimés de Dieu, et qu’il ne nous abandonne jamais.