Messe d’installation du Père Pierre de Veyrac,
Curé de l’Ensemble paroissial Saint-Julien de Brioude
Basilique Saint Julien, le 4 octobre 2020
Homélie
Confiance, paix et joie
+ Luc Crepy, évêque du Puy-en-Velay
En ce temps des vendanges et aussi en ce jour de la fête de saint François d’Assise, la Parole de Dieu développe une belle image : celle de la vigne. Cette plante, source d’un breuvage qui réjouit le cœur de l’homme (Ps 103,16), inspire apparemment Jésus dans ses paraboles, car il en parle à plusieurs reprises dans l’Evangile. Cette image de la vigne est aussi la dernière qu’il laisse à ses amis avant d’entrer dans sa passion : « Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruits, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. » (Jn 15,5).
Mais aujourd’hui, Jésus nous parle des ouvriers de la vigne du Père, ouvriers mercenaires qui ne respectent ni ses envoyés, ni même le Fils. Dans cette parabole, nous reconnaissons les prophètes envoyés par Dieu et persécutés, et, bien sûr, le Christ lui-même, mis à mort. Les envoyés à « la vigne du Seigneur qui est la maison d’Israël. » (Is 5, 7), n’ont pas été reçus par les vignerons, car ceux-ci se sont appropriés la vigne, alors qu’elle est le domaine de Dieu. Ainsi, en quelques mots, Jésus résume l’histoire du Salut et annonce déjà sa mort, mais aussi sa résurrection car « la pierre qu’ont rejeté les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux ! » (Mt 21, 42)
Et, en ce jour de votre installation comme curé de l’ensemble paroissial Saint-Julien de Brioude, Pierre, vous êtes envoyé à travailler à la vigne du Seigneur. Nous savons que vous ne serez pas comme les vignerons de la parabole, car vous êtes un vigneron solide et courageux qui fera fructifier la vigne qui vous est confiée – votre ensemble paroissial –, afin qu’elle porte beaucoup de fruits pour le Seigneur. Vous serez accompagné par deux autres vaillants vignerons en la personne des Pères Pierre Besson et David Declerck. Mais au-delà de la vigne, il s’agit bien, dans votre ministère curial, de permettre aux communautés de se construire, jour après jour, en s’appuyant sur la pierre de fondation qu’est le Christ. A vous de veiller, comme un bon architecte, que l’Eglise se construise dans le Brivadois avec toutes les pierres vivantes que sont les baptisés et, s’appuie sur le Christ qui, sans cesse, soutient et accompagne son Eglise. Vigneron, architecte mais, surtout, soyez un pasteur à la suite de l’unique Bon Pasteur. Vous conduirez le troupeau en marchant avec lui – comme le dit le pape François – soit devant le troupeau pour le guider, soit au milieu du troupeau pour l’accompagner comme le frère de tous et de chacun, soit derrière le troupeau vous laissant aussi guider par l’ensemble des baptisés qui ont reçu la lumière de l’Esprit. En ce jour, nous prions le Seigneur de vous donner la force et la joie de l’Esprit Saint pour devenir ce pasteur selon le cœur de Dieu. Et vous les paroissiens, accueillez votre nouveau curé comme un don précieux que Dieu vous fait et priez pour lui afin qu’il réponde saintement à la belle mission qui lui est confiée.
Pour mener à bien cette mission de curé, saint Paul dans la lettre aux Philippiens donne quelques conseils utiles que vous pourrez garder en mémoire. D’abord Paul, invite à la confiance. Je sais que la tâche de curé, bien qu’elle soit passionnante, n’est pas facile pour autant et même parfois pesante. Les temps ne sont pas faciles tant dans la vie du monde, avec cette pandémie, mais aussi dans la vie de l’Eglise, en ces dernières années. Pourtant ayez confiance, n’ayez pas peur ! Le pape François disait aux prêtres, à la Pentecôte dernière : « En tant que prêtres, fils et membres d’un peuple sacerdotal, c’est à nous de prendre la responsabilité de l’avenir et de le projeter comme des frères. Nous plaçons notre fragilité, la fragilité de notre peuple, celle de toute l’humanité, entre les mains blessées du Seigneur, comme une offrande sainte. C’est le Seigneur, c’est lui qui nous transforme, qui se sert de nous comme du pain, prend notre vie dans ses mains, nous bénit, nous rompt et nous partage et nous donne à son peuple. » Oui, quand Dieu, par la voix de l’Eglise, nous appelle, il nous accompagne et ne nous abandonne pas, si nous lui confions dans la prière nos tâches, nos soucis et nos joies, et, surtout, si nous lui rendons grâce pour tout ce qu’il fait pour nous. « Ne soyez inquiets de rien, mais, en toute circonstance, priez et suppliez, tout en rendant grâce, pour faire connaître à Dieu vos demandes. » (Ph 4, 6) Cette nouvelle responsabilité que vous recevez est l’occasion de renouveler votre confiance dans le Seigneur, sachant que vous n’êtes pas seul, mais en équipe avec d’autres prêtres, avec le presbyterium et votre évêque et, surtout, avec tous les membres de votre ensemble paroissial qui sont appelés, eux aussi, à cheminer avec leur nouveau pasteur et à le soutenir dans la prière et l’amitié.
Cette confiance dans le Seigneur est source de paix : « Et la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir, gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus. » (Ph 4, 7) Cette paix vous est donnée pour vous-même, mais elle est aussi à transmettre au sein des communautés qui vous sont confiées. Cette paix témoigne de la présence du Christ parmi nous. Cette paix est si nécessaire aujourd’hui dans notre monde fracturé et en quête de sens. Un pasteur selon le cœur de Dieu est un artisan de paix : il cherche sans cesse à œuvrer au sein de sa paroisse pour que les uns et les autres s’acceptent mutuellement, pour que les différences ne soient pas source de divisions mais signe de la richesse des divers charismes ; pour que la paix du Christ règne dans les cœurs afin de vivre en communion et à l’écoute de l’autre. Enfin, de la confiance et la paix, surgit la joie. Puisse votre nouveau ministère vous combler de joie : la joie profonde de servir le Christ et son Eglise ; la joie d’annoncer l’Evangile à tous ; la joie d’être un pasteur heureux avec son troupeau ! Et pour conclure, citons le saint Curé d’Ars : « Un bon pasteur, un pasteur selon le cœur de Dieu, c’est là le plus grand trésor que le bon Dieu puisse accorder à une paroisse, et un des plus précieux don de la miséricorde divine. »