Proximité de Dieu pour tous

Si Marie avait accouché à l’auberge, les bergers seraient-ils venus voir l’enfant Jésus ? Parmi les plus pauvres de leur temps, les bergers n’auraient sans doute pas osé aller frapper à la porte de l’auberge, ou bien les aurait-on chassés en leur demandant de rester dans leurs champs et de ne pas déranger ! Mais non, comme il n’y avait pas de place dans la salle commune, c’est dans une étable – une crèche –  que Marie mit au monde son fils, l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire (cf. Lc 2,7). Le Messie, le Sauveur, Celui qu’annonçaient les prophètes, Celui que le peuple d’Israël attendait depuis si longtemps naît dans une étable, est couché dans une mangeoire sur de la paille et s’offre ainsi aux yeux de tous.

À l’annonce des anges, les bergers se rendent à la crèche. Ils y vont sans crainte, surpris que les anges leur aient parlé à eux, simples bergers. Voir un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ne les effraie pas, au contraire ils vont se réjouir de cette naissance avec les parents de l’enfant et leur apporter leur soutien et leur réconfort. Il n’y a pas de barrière, d’obstacle pour cette première rencontre entre le Fils de Dieu et les hommes. Comme l’écrit le pape François : « Contrairement à tant de personnes occupées à faire mille choses, les bergers deviennent les premiers témoins de l’essentiel, c’est-à-dire du salut qui est donné. Ce sont les plus humbles et les plus pauvres qui savent accueillir l’événement de l’Incarnation. À Dieu qui vient à notre rencontre dans l’Enfant Jésus, les bergers répondent en se mettant en route vers Lui, pour une rencontre d’amour et d’étonnement reconnaissant.[1] »

Dans cette mangeoire en bois, toute simple, le Fils de Dieu accueille, d’une certaine manière, toute notre humanité à travers ces bergers, à travers les plus pauvres. Dieu se rend ainsi proche de chacun de nous, de tout être humain quel qu’il soit. Or pour beaucoup, Dieu est quelqu’un de lointain, d’inaccessible, de puissant ou encore d’inconnu car trop de choses semblent le séparer du simple mortel ! Le signe de la crèche nous est donné dès le début de l’Évangile pour annoncer cette proximité de Dieu, et donc cet amour pour chacun. Et le pape d’insister dans sa belle lettre sur « le merveilleux signe de la crèche » : « Les pauvres et les simples dans la crèche rappellent que Dieu se fait homme pour ceux qui ressentent le plus le besoin de son amour et demandent sa proximité. Jésus, « doux et humble de cœur » (Mt 11, 29), est né pauvre, il a mené une vie simple pour nous apprendre à saisir l’essentiel et à en vivre. [2]»

Dieu se fait homme pour ceux qui demandent sa proximité… Voilà la bonne nouvelle de Noël ! Voilà ce qui nous permet de nous souhaiter un joyeux Noël : la naissance de Jésus, c’est la proximité de Dieu avec tout être humain. La joie des bergers est aussi notre joie ce soir : ils ont vu, ils ont approché, ils ont contemplé le Sauveur, le Christ. Nous aussi, nous croyons qu’en Jésus, Dieu vient à notre rencontre et se révèle ainsi proche de chacun de nous. Dieu ne fait pas peur car tous peuvent s’approcher de Lui. Ce soir, nous avons notre place à la crèche. C’est pour cela qu’il y a tant de santons si divers : tous les métiers, tous les âges, toutes les tenues… car, à la crèche, toute l’humanité est invitée du plus pauvre au plus riche, du plus fort au plus faible, du plus jeune au plus vieux ! Les bergers nous ont ouverts le chemin vers la crèche et ce chemin demeure ouvert pour tous, aujourd’hui comme demain.

Dans cette mangeoire en bois, toute simple, le Fils de Dieu se révèle ainsi proche de tous. C’est aussi sur une croix en bois, toute simple, que Jésus manifestera, de nouveau, pleinement sa proximité avec notre humanité. Le bois de la croix, c’est le Christ qui se fait proche de tous ceux et celles qui souffrent de la violence et de la haine, qui combattent les injustices au prix de leur vie. Sur le bois de la croix, comme sur le bois de la mangeoire, Dieu en Jésus se fait proche de tout ce qui défigure notre monde comme de tout ce qui est source de joie. La proximité de Dieu n’est pas une simple idée, mais elle a pris chair, elle s’est incarnée en ce Jésus de Nazareth, fils de Marie, dont nous faisons mémoire de la naissance ce soir. Oui, Dieu s’est approché définitivement de nous. Oui, Dieu se fait proche de nous si nous osons le reconnaître en ce petit enfant couché dans une mangeoire ou en cet homme sur le bois d’une croix.

Cette proximité du Christ, nous la vivons très concrètement au cours de cette messe où nous célébrons Jésus mort et ressuscité à travers le pain et le vin devenu son corps et son sang. En communiant au Christ ressuscité, toujours vivant et présent parmi nous, nous accueillons sa présence dans nos vies. Il y a deux mille ans, nous n’étions pas avec les bergers à la crèche, mais ce soir nous sommes encore à la crèche car le Christ est vivant et vient à notre rencontre.

Puissions-nous redécouvrir cette proximité de Dieu dans nos vies et nous souhaiter alors un très heureux et un très joyeux Noël !

+ Luc Crepy, Évêque du Puy-en-Velay


[1] Pape François, Le merveilleux signe de la crèche, 2019, §5.

[2] Idem § 6.