Fête du Sacré-Cœur de Jésus
Homélie prononcée par Mgr Luc Crepy, évêque du Puy-en-Velay, le 28 juin 2019, en la cathédrale du Puy-en-Velay.
« Frères, l’amour de Dieu a été répandu en nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné. » (Rm 5,5). Oui, le jour de notre ordination, chers frères prêtres, par l’imposition des mains de l’évêque et de l’ensemble du presbyterium, nous avons reçu l’Esprit de Jésus qui a fait de nous des pasteurs de son troupeau. Nous avons reçu l’Esprit du Bon Berger pour être à la suite de l’unique Pasteur – le Christ – des hommes témoins de l’amour de Dieu par l’amour que nous portons à la communauté qui nous est confiée et à chaque personne que Dieu met sur notre chemin, proche ou loin de l’Eglise. L’Esprit qui nous a été donné fait de nous des pasteurs selon le cœur de Dieu (cf. Jr 3,15) et c’est à ce don de Dieu, cette vocation, cet appel que nous cherchons à répondre tout au long de notre ministère et de notre vie de prêtres.
C’est le motif de notre action de grâce au cours de cette eucharistie : l’Esprit du Seigneur ne nous abandonne pas, comme en témoignent la fidélité vécue tout au long de ces 70, 60, 50 années de ministère par les plus anciens, comme il n’abandonne pas ceux qui fêtent leurs premières décennies de prêtrise ! Quand le Seigneur appelle, il nous donne la force de vivre pleinement notre ministère. Ceci ne signifie pas que la route soit facile, que les épreuves soient absentes, que le célibat ne soit pas lourd à porter en certaines périodes de la vie, que l’exercice du ministère soit simple face à la complexité de notre société et aux changements de notre monde. Si le chemin que le Christ trace à ses disciples s’inscrit au cœur du monde avec ses joies et ses peines, il ne nous laisse pas marcher seul, il demeure avec nous sur la route. Si parfois, comme sur le chemin d’Emmaüs, nos yeux ne le reconnaissent pas, nous croyons, quand nous partageons le pain et le vin, que le Christ mort et ressuscité est présent à nos côtés. Et résonne en nous, la dernière parole que laisse Jésus à ses apôtres et qui s’adresse à chacun de nous : « Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » (Mt 28, 19-20) L’anniversaire de notre ordination, c’est fêter cette présence aimante et continue de Jésus à nos côtés, c’est nous rappeler que nous comptons pour lui et qu’il compte sur nous pour devenir toujours plus des pasteurs selon son cœur.
« Frères, l’amour de Dieu a été répandu en nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné. » (Rm 5,5). Qu’est-ce qui caractérise l’amour répandu dans nos cœurs pour que nos cœurs soit à l’unisson de celui du Bon Pasteur ? L’évangile de ce jour nous dit que la miséricorde est l’attitude fondamentale qui anime et réjouit le Bon Berger. Il est celui qui va chercher dans le désert la brebis perdue et qui n’a de cesse de la retrouver, laissant les 99 autres. « Et quand il l’a retrouvée, il la prend sur ses épaules, tout joyeux. » (Lc 15, 5). La joie du Bon Pasteur est de retrouver ceux et celles qui se sont perdus, qui sont loin de Dieu, qui sont pécheurs, qui sont en quête de sens et errent dans le désert de leur existence. « C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15,07)
Notre joie de prêtres – souhaitons que nous demeurions des hommes habités par la joie de l’Evangile – nous la trouvons, nous la cherchons, nous la vivons dans l’annonce de cette bonne nouvelle de la miséricorde de Dieu qui va rejoindre ceux qui pensent ne plus être rejoints par Dieu ; miséricorde de Dieu qui pardonne – comme nous le vivons dans le sacrement de la Réconciliation – ; miséricorde de Dieu qui invite à se relever, à marcher quand l’espérance semble morte – comme nous le vivons dans la célébration des funérailles – ; miséricorde de Dieu qui se donne pleinement par amour pour tous dans chaque eucharistie. « La brebis perdue, je la chercherai ; l’égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la panserai. Celle qui est malade, je lui rendrai des forces. Celle qui est grasse et vigoureuse, je la garderai, je la ferai paître selon le droit. » (Ez 34,16)
Prêtres, nous sommes des pasteurs selon le cœur de Dieu quand nous sommes témoins de sa miséricorde et que nous en vivons aussi pour nous-mêmes dans nos propres fragilités et faiblesses. C’est ce qui fait la joie de notre ministère : une joie profonde qui n’est pas superficielle mais qui traduit que le sens de notre vie repose sur le Christ, Bon Pasteur. Célébrer ensemble la fête du Sacré-Cœur et la fête des prêtres jubilaires est une heureuse coïncidence que nous offre la liturgie. C’est une invitation à renouveler notre confiance et notre engagement à la suite du Christ en lui demandant qu’il nous aide sans cesse à ne faire qu’un seul cœur avec le sien : porter en nos coeurs le soin aimant et attentif de ceux et celles qui nous sont confiés et raviver la joie d’être témoins de la miséricorde de Dieu pour les hommes et les femmes de notre temps.
Demandons à Marie dont le cœur ne fait qu’un avec celui de son Fils de nous aider à devenir de jour en jour des pasteurs selon le cœur de Dieu. Amen.
+Luc Crepy, évêque du Puy-en-Velay