“L’Église de Saint Germain Laprade est une des plus anciennes et des plus curieuses églises romanes du diocèse du Puy en Velay” d’après un auteur de la semaine religieuse du Puy en 1900, sans doute élevée à l’emplacement d’un lieu de culte romain. La construction a dû commencer dans les années 976. La première date où l’on parle officiellement de l’église est 1164.

LA COMMUNE La commune de Saint-Germain-Laprade est située à l’est du Puy. C’est la plus grande commune du canton Le Puy-Est. Son altitude varie de 607 m vers le val des Bories à 925 m au Suchas. Elle compte environ 3200 habitants qui vivent à Saint Germain ou dans l’un des 24 villages qui la composent. Plus de300 enfants sont scolarisés dans 5 écoles.

Le très ancien bourg de Saint-Germain, situé sur le bord de la voie romaine Le Puy en Velay – Vallée du Rhône par les hauts plateaux du Velay – Vivarais, a sans doute remplacé une agglomération gallo-romaine : il existe de nombreuses inscriptions latines dispersées dans le bourg.

En 976, un évènement considérable eut lieu dans la plaine de Saint-Germain : Guy d’Anjou, évêque du Puy, aidé de ses neveux Pons et Bertrand, imposa la paix aux Seigneurs toujours en guerre, et les contraint à assurer le respect de celle-ci et à rendre les biens volés. C’est une assemblée de justice, le Plaid de Saint-Germain ou Paix de Dieu. Il constitue un des premiers exemples de la victoire du droit sur la force.

LE PORTAIL 
En pénétrant dans l’église on peut admirer le remarquable portail, peut-être apporté de l’abbaye de Doue. 
L’arc extérieur retombe sur des colonnettes ; sur les chapiteaux on découvre deux rangs de feuilles plates et des petits masques. 
L’arcade intérieure repose sur des petites piles surmontées de chapiteaux sculptés de feuillages plats et s’orne d’un motif de bâtons brisés. 
Quelques traces de peinture sont visibles sur les pierres taillées en forme de coin (claveaux), elles suggèrent la splendeur de ce portail.

Après avoir poussé la lourde porte en bois massif refaite au vingtième siècle on franchit le seuil matériel et spirituel.

LE CHOEUR 
Au début, l’édifice comprenait simplement un chœur surmonté d’une coupole, certainement construit sur les ruines d’une construction de l’époque gallo-romaine. L’intérieur du choeur est très beau avec sans doute le réemploi de colonnes antiques. La coupole est l’élément majeur de cette construction, construite en petits matériaux grossièrement taillés. L’appareil irrégulier à gros joints frappe d’abord l’œil ainsi que la voûte impressionnante qui s’élève à environ dix mètres du sol. Tout au sommet on distingue une ouverture de 80 centimètres de diamètre, fermée actuellement, permettant de communiquer avec le clocher. 
Dans la seconde moitié du XIIème siècle, les moines de Doue rajoutent la nef au sanctuaire déjà existant. La communication entre le chœur et la nef est difficile. 
A la fin du XVème siècle eurent lieu les premières transformations notables : des chapelles latérales gothiques furent construites à la suite de donations par les Seigneurs de Saint-Germain et les abbés de Doue.

LES CHAPELLES, LA NEF 
La première, côté sud, est connue dés son origine au XVème siècle, sous le vocable de Saint-Jean-Baptiste. Sa voûte sur croisée d’ogives, aux fines nervures moulurées, s’appuie sur des colonnettes d’angle. La clé, assez imposante mais finement travaillée, représente, au centre d’une rosace étoilée, l’Agneau de Dieu. Dans l’enfeu(1) repose un Christ retrouvé dans le clocher : un Christ en croix dont les bras avaient disparu. Les artisans de cette première chapelle gothique furent Jean et Claude Burianne, oncle et neveu, anciens prieurs de Saint-Germain. Cet oratoire devint plus tard la chapelle funéraire de la famille Morgues. C’est ce qui explique la présence de la litre funéraire sur le mur intérieur (la litre est un ornement funéraire pour des funérailles solennelles). Le style de construction prouve que cette chapelle, déjà dédiée à Saint Jean Baptiste précède l’autre chapelle, consacrée, elle à la Vierge, à Saint Jean Baptiste et à Saint Jean L’Evangéliste.

La deuxième, côté sud-est, du XVIème siècle (1529), est connue sous le vocable de la Vierge et des deux Saint Jean. C’est le prieur Mathieu Rostaing qui, avec le prêtre Jean Chambon du Villard, mit en chantier cette seconde chapelle gothique. La chapelle est en grés et voûtée d’une croisée d’ogives. Une belle clé de voûte, en forme de losange, avec un ange tenant un écusson porte les monogrammes du Christ et de la Vierge (J.H.S.M.A.). Les dimensions de l’endroit ont permis d’installer le premier monument aux morts de la guerre 1914-1918, le 2 octobre 1921.

Après cette “chirurgie gothique”, il fallut attendre le dix-huitième siècle pour que la nef connaisse de nouvelles transformations. En 1755 le prieur André Maistre fit agrandir l’arc triomphal, situé au-dessus de la ligne de séparation actuelle du chœur et de la nef ; de ce fait on réduisit les deux pans de mur latéraux qui supportaient cet arc. Claude Debard, architecte et inspecteur royal des Ponts-et-Chaussées, fut chargé de démolir ce mur de séparation entre la partie réservée au sanctuaire et le sanctuaire proprement dit. L’architecte créa une ouverture de 6.50m, celle que nous voyons aujourd’hui.

Au Nord on ajouta deux nouvelles chapelles latérales basses. Pour mieux comprendre ces travaux colossaux, il faut imaginer un mur lisse prolongeant le mur du chœur dans la nef. La date de 1772 placée sur un linteau indique le moment de la construction où l’on défonça les arcs de décharge romans pour donner le jour à ces deux nouvelles chapelles, au nord, du côté du château. Ces deux nouvelles chapelles postérieures sont moins riches, les arcs qui les introduisent devaient protéger des fenêtres enlevées lors de la défonce des murs.

Lors d’un inventaire de 1839, les chapelles ont été ainsi nommées : « du côté de la sacristie l’une est sous le vocable de Notre Dame du Rosaire ; l’autre sous le vocable de Saint Jean-Baptiste. Du côté nord, il y a deux chapelles l’une sous le vocable de Saint André, l’autre du Saint Sépulcre ». Il semble que certaines dénominations aient été modifiées. En l’an 2000, il est convenu d’appeler chapelle de la Vierge la deuxième à droite en entrant, la première étant dénommée chapelle de Jeanne d’Arc ou du monument aux morts ; à gauche en entrant, on trouve la chapelle de fonds baptismaux, puis celle de saint Joseph, du nom de la statue qui s’y trouve donnée en 1866 par le paroissien Jévolde.

Plusieurs statues, œuvres de la fin du siècle dernier ou de la première moitié du vingtième représentent différentes personnalités de la liturgie chrétienne comme le Curé d’Ars. Sur les murs du bâtiment sont accrochées les quatorze représentations du chemin de croix. Une statuette de la Vierge volée en mai 2000 a été remplacée par une copie à l’identique.

La tribune actuelle construite en 1985 sur des plans des Bâtiments de France remplace une ancienne tribune des « Pénitents » édifiée en 1816.

L'orchestre {JPEG}

LE CLOCHER 
Les visiteurs se demandent souvent quel est le contenu du clocher. Il y a en fait deux parties : la première haute de 8 mètres se termine en arrondi avec une étroite ouverture et une trappe donnant sur la deuxième partie, une sorte de terrasse vide et à ciel ouvert, la partie rehaussée en 1913 formant barrière. 
Cette fortification très artificielle ne doit pas tromper. Nul ne connaît le couronnement primitif du clocher. La bretèche(2)d’apparence militaire placée au sommet ne se trouve pas à l’aplomb de l’entrée, ce qui écarte l’hypothèse d’une tour de défense. 
L’actuelle porte du clocher, d’origine indéterminée, s’ouvre sous l’arc ouest. L’escalier d’accès aux parties supérieures est lui aussi de construction récente mais des dates précises manquent. Dans la première les occupantes principales sont deux cloches, datant de l’époque révolutionnaire, suspendues à un énorme appareillage de poutres. La première, une des plus anciennes du pays, fondue le 7 août 1593 portait le nom de Maria et l’inscription : Laudate dominun in cymbalis bene sonantibus : laudate eum in cymbalis jubilationis ; omnis spiritus laudet Dominun (Louez le Seigneur avec des cymbales retentissantes ; louez-le avec des chants de joie ; que tout esprit loue le Seigneur)
Lors de la révolution, la seconde fut démontée par les habitants de Saint-Germain-Laprade pour, dit-on, la soustraire à la rapacité des révolutionnaires de Rosières. Ils l’enterrèrent dans un champ du Mas, mais, avertis par des incroyants, les citoyens de Rosières vinrent l’extraire et l’emportèrent dans leur village (L’écho du Velay). Bien plus tard le maire de Saint-Germain entreprit des démarches mais, n’ayant aucun titre en main, il n’obtint pas la restitution. 
Avant 1970, il fallait, trois fois par semaine, remonter un énorme poids en pierre qui, en descendant très lentement, permettait à la pendule extérieure de fonctionner.

Cette église possède la luminosité spécifique aux églises romanes, ce clair-obscur qui donne l’impression de passer dans un autre monde paisible et silencieux propice au recueillement et à la prière.Ce document a été réalisé avec l’ouvrage de Jacques Arnaud et de Paul Charpentier « Saint-Germain-Laprade » paru aux éditions du Roure. 
Des articles du quotidien « L’Éveil »ont été utilisés. M.M.M.

(1) ENFEU : niche funéraire en arcade ; à fond plat, ménagée dans les murs d’une église. 


(2) BRETECHE : ouvrage de fortification, muni de créneaux et avancé sur une façade.